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La réparation du dommage causé par l'illégalité d'un acte administratif



Après avoir gagné mon recours en annulation contre un acte administratif, quelles sont les voies qui s'ouvrent à moi pour obtenir une réparation complète de mon préjudice?

La réparation du dommage causé par l’illégalité d’un acte administratif

Je gagne mon recours en annulation contre un acte pris par une autorité administrative. Mon dommage est-il entièrement réparé ? Ou puis-je obtenir réparation du préjudice causé par cet acte ?

Cela va de l’annulation du permis d’urbanisme de mon voisin à l’annulation de la décision du Conseil de classe.

Depuis de longues années, le justiciable a la possibilité de contester un acte administratif devant un juge spécialisé : le Conseil d’Etat. Celui-ci a compétence pour suspendre les effets d’un acte administratif attaqué et pour prononcer son annulation dans l’ordre juridique.

L’annulation de l’acte administratif est incontestablement une victoire pour le justiciable qui en a fait la demande, mais elle ne répare pas toujours le dommage que cet acte a pu lui causer.

En effet, un acte illégal peut avoir causé un dommage matériel ou moral au justiciable. Ces dommages ne sont pas totalement réparés par l’arrêt prononçant l’annulation.

Comment obtenir la réparation de ces dommages, outre l’annulation de l’acte ? Deux voies sont possibles.

  1. Devant les juridictions civiles

Jusqu’en juillet 2014, le justiciable n’avait qu’une seule possibilité pour réclamer la réparation du dommage causé par un acte administratif dont le Conseil d’Etat avait reconnu l’illégalité : c’était de saisir un autre juge, le juge civil, qui avait compétence pour connaître de cette problématique.

La réparation des compétences au sein même de l’ordre judiciaire, n’autorisait alors pas le Conseil d’Etat de se saisir de cette problématique considérée comme « civile » et non administrative, et donc hors de sa compétence.

La procédure devant le juge civil se calque sur le contentieux de la responsabilité (articles 1382 et suivants du Code civil). Aussi, le justiciable devra apporter la preuve :

-          d’une faute dans le chef de l’administration (parfois, l’illégalité de l’acte ne suffit pas à démontrer que l’administration a commis une faute … l’administration peut en effet se tromper, sans commettre de faute) ;

-          d’un dommage qu’il a subi suite à cette faute ;

-          que sans cette faute, son dommage ne se serait pas produit ou pas produit de la même manière.

Toutes les règles du procès « civil » vont s’appliquer à cette procédure, dont notamment la possibilité de fixer son dommage via une expertise judiciaire contradictoire et contraignante.

  1. Devant les juridictions administratives

Depuis juillet 2014, une nouvelle voie s’ouvre aux justiciables désireux d’obtenir réparation de leur préjudice. Ils peuvent en effet demander la réparation directement auprès du juge qui a prononcé l’annulation de l’acte administratif : le Conseil d’Etat. Soit, en même temps que l’annulation, soit une fois que l’arrêt en annulation a été prononcé.

Ils devront justifier, dès le dépôt de leur demande, leur préjudice … dans son globalité : il ne sera donc pas possible de le compléter en cours de procédure, par le biais d’une expertise, par exemple. D’où l’importance d’être complet et précis dès le départ.

Le débat de la faute s’efface mais un autre élément va être pris en compte : les intérêts publics et privés en présence. Notion large, laissée à l’appréciation du juge administratif qui sera notamment aidé par l’avis de l’auditorat.

  1. Conclusions

Le justiciable doit faire un choix : soit réclamer son dommage devant le juge civil, soit devant le juge administratif. Il ne pourra plus revenir en arrière ni tenter l’autre voie s’il n’est pas satisfait du résultat de celle choisie.

Le choix est exclusif : la loi n’autorise pas l’introduction des deux recours.

Le juge civil est rôdé à cette problématique de la réparation du dommage qu’il connaît depuis longtemps. La procédure offre une certaine souplesse dont ne fait pas preuve la procédure administrative actuelle, notamment dans l’évaluation du dommage (expertise possible, détermination du dommage en cours de procédure, reconnaissance d’un dommage moral …).

Le choix du justiciable doit être avisé, vu les enjeux.

L’intérêt d’opter pour une voie plutôt que l’autre dépend des circonstances qui sont propres à chaque hypothèse.

Il convient donc de prendre conseil auprès de spécialistes avant d’opter pour une de ces deux voies.

 

Christelle CHIURULLI

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