Logo Troxquet-Avocats

La perceptibilité des honoraires et frais d'avocats



De quoi s'agit-il ?

La matière de la répétibilité est celle qui touche le point au combien sensible pour tout justiciable (particuliers, entreprises privées ou publiques, prévenus, parties civiles) de la prise en charge de ses frais d’avocat au sens large, c’est-à-dire des frais et honoraires de son avocat.

Le législateur est intervenu récemment pour réglementer la matière en établissant une nouvelle loi du 21.04.2007 qui comporte un article 7 qui modifie l’article 1022 du Code Judiciaire relatif aux indemnités de procédure.

Pour bien comprendre le but poursuivi par le législateur en édictant cette loi, il faut faire un petit retour en arrière et distinguer trois périodes :

1) Avant le 02.09.2004

Quelles étaient les règles applicables pour la prise en charge des frais et honoraires d’avocat ?

La matière était réglementée par l’article 1022 du Code Judiciaire – ancienne mouture.

Toute partie à un procès civil ou commercial pouvait demander la condamnation de la partie qui succombait à lui payer un montant appelé « indemnité de procédure »

Quels montants ?

Le montant maximum, c’est-à-dire pour les affaire supérieures à 2 500,00 € était de plus ou moins 350,00 €.

Même en faisant preuve de beaucoup de modération, l’avocat de la partie qui gagnait trouvait rarement dans cette indemnité de procédure un montant suffisant pour couvrir ses frais et honoraires de telle sorte que le justiciable qui gagnait devait, dans 99 % des cas, mettre la main à son portefeuille pour payer son conseil.

Goût amer évidemment dans la bouche du vainqueur car, même en gagnant sur toute la ligne son procès, il perdait quand-même quelques centaines ou quelques milliers d’euros selon la difficulté du dossier

2) Le 02.09.2004

La Cour de Cassation de Belgique prononce un arrêt qui met en ébullition l’ensemble du monde judiciaire puisque, pour la première fois, la Cour suprême décide que les frais et honoraires de l’avocat d’une partie constitue une partie intégrante de son dommage et, en conséquence, tout justiciable qui expose des frais de défense peut les réclamer à son adversaire.

Pluie de réclamations devant les Tribunaux qui vont réagir de façon tout à fait disparates.

Certains vont appliquer la jurisprudence sensu stricto et on va fleurir des décisions portant condamnation à des montants parfois très importants, certains autres estiment que pour telle ou telle procédure, il n’est pas nécessaire d’avoir un avocat et rejette la réclamation des frais et honoraires à faire supporter par l’adversaire.

D’autres enfin ne tranchent pas la question et invitent les avocats à s’expliquer et à justifier les raisons pour lesquelles ils ont dû intervenir, les raisons pour lesquelles ils ont posé tel ou tel acte et pourquoi ils le valorisent à tel montant…

Chacun des acteurs du monde judiciaire s’est rapidement aperçu que l’application de la jurisprudence de la Cour de Cassation du 02.09.2004 posait plus de problèmes qu’elle n’en réglait.

Madame ONKELINCKX, Ministre de la Justice, s’est alors tournée verse les ordres francophone et néerlandophone du Barreau afin de demander selon eux, qu’elle serait la règle à édicter pour ramener une certaine sérénité dans les prétoires.

Néerlandophones et francophones se sont concertés et d’une seule voix, ont invité le législateur à établir une disposition nouvelle qui mettrait un terme aux dérives de l’arrêt de la Cour de Cassation du 02.09.2004 et rassurerait tous les acteurs du monde judiciaire par la fixation de nouvelles indemnités de procédure qui, cette fois, tiendraient mieux compte du coût réelle d’une procédure judiciaire.

3) Nous arrivons ainsi à la loi du 21.04.2007 qui énonce que l’indemnité de procédure est une intervention forfaitaire dans les frais et honoraires d’avocat de la partie ayant obtenu gain de cause.

Cette loi renvoie à un arrêté royal qui fixe le montant de ces fameuses indemnités de procédure.

La loi date du 21.04.2007 et l’arrêté royal qui fixe ces fameuses indemnités n’a été pris que le 26.10.2007 et est entré en vigueur le 01.01.2008.

Que faut-il retenir de cette loi et de l’arrêté royal qui la complète ?

L’indemnité de procédure est désormais la seule indemnité à laquelle la partie qui obtient gain de cause peut prétendre au titre de l’intervention d’un avocat.

Elle a donc un caractère à la fois exclusif et limitatif…

Ce double caractère ne signifie par qu’une partie qui doit faire appel à un conseiller technique (ingénieur, architecte, médecin-conseil…) ne peut plus réclamer la condamnation de la partie adverse au paiement des frais de son conseil technique mais signifie uniquement que l’on ne peut plus fonder la réclamation de ses frais et honoraires d’avocats sur la jurisprudence de la Cour de Cassation du 02.09.2004 puisque désormais, ces frais et honoraires sont compris dans l’indemnité de procédure fixée par arrêté royal.

Il faut savoir que cette indemnité est due pour toutes les procédures civiles, sociales, commerciales et fiscales.

A titre exemplatif, vous devez savoir que :

• pour les procédures évaluables en argent de 750,00 à 2500,00 €, le montant minimal est de 200,00 € et le montant maximal est de 1 000,00 €.
• pour les procédures de 5 000,00 à 10 000,00 €, le montant minimal est de 500,00 € et maximal de 2 000,00 €
• pour les affaires au-dessus de 1 000 000,00 d’euros, le montant minimal est de 1 000,00 € et le montant maximal de 30 000,00 €.
La nouveauté de cette loi du 21.04.2007, c’est qu’elle permet désormais la réclamation d’une indemnité de procédure en matière pénale.

Brièvement, on peut citer 2 exemples plus particuliers :

1) la partie civile qui obtient la condamnation d’un prévenu peut également demander sa condamnation à une indemnité de procédure

2) à contrario, la partie civile qui s’est constituée contre un prévenu qui bénéficie d’un non-lieu ou d’un acquittement devra payer à ce prévenu acquitté ou renvoyer des poursuites également une indemnité de procédure.

Il faut savoir que cette loi du 21.04.2007 et son arrêté royal sont applicables immédiatement aux affaires en cours.

Cela signifie que l’on peut toujours, même si nous sommes en degré d’appel ou même si l’affaire est fixée devant le Tribunal, rédiger des conclusions nouvelles pour intégrer cette demande et demander au Juge qu’il condamne son adversaire au paiement d’une indemnité de procédure.

En conclusion : que retenir de cette loi et de son arrêté royal ?

2 choses à retenir :

1) Le justiciable est aujourd’hui dans une position bien plus confortable lorsqu’il triomphe dans.

Il pourra, dans un certain nombre de cas, compter sur le montant de l’indemnité de procédure qui lui aura été allouée pour payer en tout ou en grande partie les frais et honoraires.

2) Avant d’entamer un procès, il faut tenir compte de la possibilité d’être condamné à des montants qui parfois, sont très importants.

Les conséquences financières des procès perdus ne sont plus les mêmes que par le passé et cela doit nécessairement inciter l’avocat en premier lieu et le justiciable en second lieu à bien réfléchir avant de conseiller ou d’entamer une procédure car il pourrait y avoir, au bout de celle-ci une obligation à payer un montant qui, pour les affaires d’une certaine importance, peuvent être très élevés.
           

P.S. ajouter que c’est le Juge qui modalise, en fonction de certains critères, la hauteur de l’indemnité de procédure